Ruines du Grand Zimbabwe
Le Trésor Caché du Roi Salomon

Environ huit mille sites archéologiques ont été découverts jusqu'ici entre les fleuves Zambèze et Orange. Celui des ruines du Grand Zimbabwe, situé au milieu d'une grande zone verte, à 500 kilomètres environ du Zambèze, est sans doute le site le plus important et le plus admirable.
Histoire du Zimbabwe
Les premières descriptions de l'immense règne du Zimbabwe, qui comptait à peu près quinze mille habitants, nous ont été transmises par les Portugais, qui débarquèrent en Afrique au XVIe siècle. Sur l'origine de cette cité gigantesque, dont il ne reste aujourd'hui que peu de traces, plane le mystère. De nombreuses hypothèses ont été formulées, mais aucune ne paraît satisfaire entièrement les archéologues. Entièrement construite en pierre, la cité du Grand Zimbabwe fut bâtie par les autochtones, bien avant l'arrivée des Européens et des Arabes. Le complexe domine une structure gigantesque ressemblant à une acropole, tandis qu'au-dessous on découvre un rempart de 250 mètres de circonférence, atteignant à certains endroits 10 mètres de haut.
La tour conique

Cette grande structure de défense fut réalisée avec des blocs de granit transformés en briques (d'une épaisseur jamais inférieure à un mètre), solidement unis les uns aux autres sans aucun liant. Pleine de charme et de mystère, la tour conique située au milieu de la cité du Zimbabwe est une structure sans fenêtres, portes ni escaliers intérieurs. Les hypothèses les plus variées ont été avancées sur l'usage auquel elle était destinée. Certains ont pensé qu'elle avait un rôle symbolique ou qu'elle était utilisée pour des cérémonies rituelles, dont nous ne possédons toutefois aucun témoignage. De manière plus prosaïque, d'autres ont supposé qu'il s'agissait d'un dépôt de céréales, sorte de précurseur du silo. Cependant, aucune de ces hypothèses ne nous éclaire suffisamment sur la véritable destination de cette construction.
Le trésor du roi Salomon
Pendant longtemps, on a cru que dans les ruines du Grand Zimbabwe avaient été déposés les grands trésors du roi Salomon, dans un lieu inconnu de tous, qui a inspiré beaucoup de suppositions et de mythes. Vers le milieu du XVIe siècle, Joao de Barros, un historien portugais, écrivait que le lieu où avaient été cachés les trésors de Salomon était dénommé symbaoe par les indigènes. On fit immédiatement le lien avec le Zimbabwe. Cependant, les recherches et les expéditions ne permirent de retrouver aucune trace des trésors perdus, et l'unique découverte fut celle du site historique et archéologique constitué par l'ensemble urbain de l'ancienne cité africaine.
On pense aujourd'hui que la légende sur les immenses trésors cachés est liée au rôle de grand centre d'échanges et de commerces joué par le Grand Zimbabwe. C'est par là que passaient en effet les caravanes, et c'est là que l'on vendait et échangeait les marchandises comme l'or, ou les esclaves. Près des cités se trouvaient aussi des mines d'où l'on extrayait les minéraux précieux qui contribuèrent à accroître la richesse des habitants de cette région d'Afrique.
Le règne du prêtre Jean

Ne pouvant pas prouver avec certitude l'existence d'un lien entre l'ancienne cité du Grand Zimbabwe et des personnages historiques, certains chercheurs ont tenté d'établir des relations entre ce lieu mystérieux et des personnages dont l'existence n'a jamais été réellement prouvée. Un nom récurrent dans ce contexte est celui du prêtre Jean, seigneur de royaumes mystérieux, situés aux limites du monde connu. Les informations historiques que nous possédons sur lui sont très rares et surtout très contradictoires. On sait néanmoins que le théologien Jean le Grammairien, qui fut le représentant du mouvement iconoclaste de Byzance, était surnommé “prêtre Jean” : à la fin de l'iconoclasme, il devint un personnage plutôt détesté, associé à l'univers de la magie et de l'hérésie.
Mais revenons à la légende. Dans l'imaginaire populaire du Moyen Âge, le prêtre Jean est un être mystérieux, doté de pouvoirs surnaturels, souverain d'un royaume extraordinaire. La légende raconte qu'en 1165, des lettres arrivèrent à l'empereur Byzantin Manuel Ier, au pape Alexandre III et à Frédéric Barberousse, d'un certain Johannes Presbyter, roi-prêtre d'un royaume richissime et prospère, où vivaient des gens à la peau noire. La lettre révélait de nombreux détails du royaume fabuleux du prêtre Jean, peuplé de créatures de différentes espèces (licornes, faunes, satyres et femmes de la même espèce, pygmées, cynocéphales, géants, cyclopes et oiseau-phénix), et d'hommes qui se nourrissaient de la chair de leurs morts. Malgré les thèmes mythiques et ces descriptions impressionnantes, la lettre fut prise au sérieux et, en 1177, le pape, en accord avec Frédéric Barberousse, envoya une réponse au prêtre Jean, mais on ne sut jamais rien de l'expédition envoyée par l'ambassade : elle disparut peut-être dans le désert de l'Irak.
Personne n'est sûr non plus du témoignage livré dans le Supplementum Chronicarum de l'Italien Filippo Foresti (1493), selon lequel des ambassadeurs du prêtre Jean passèrent par Gênes en 1306, lors d'une mission se rendant dans le règne d'Aragon. Le royaume du Prêtre Jean fut tantôt situé en Afrique et tantôt en Asie. Au début du XIVe siècle les missionnaires et les voyageurs mentionnaient l'existence d'un souverain africain extrêmement riche et puissant, qu'ils dénommèrent le prêtre Jean : c'est peut-être la création même de ce mythe et sa diffusion qui contribuèrent, au fur et à mesure, à son déplacement géographique. Le prêtre Jean sortit de l'histoire aussi mystérieusement qu'il y était entré, en ne laissant que de faibles traces et une lettre que personne ne pense aujourd'hui être authentique. Au Zimbabwe, on ne peut admirer que les vestiges d'une grande cité bien organisée que certains croient être le siège de son royaume. Un royaume sans nom, bâti avec maîtrise et riche d'énigmes restées sans réponse.
Le prêtre Jean et Marco Polo
Dans le Livre des Merveilles, Marco Polo raconte que Gengis Khan demanda au prêtre Jean la main de sa fille, mais que celui-ci la lui refusa. Ce refus fut l'étincelle qui déclencha une guerre. Avant de rencontrer l'ennemi, Gengis Khan “fait venir devant lui des astrologues qui étaient chrétiens et sarrasins et leur ordonne qu'ils sussent dire qui allait gagner la bataille (…) Les chrétiens eurent immédiatement devant eux un grand roseau vert, le tranchant par moitié dans la longueur et puis en mirent une partie du côté de Cinghis et l'autre du côté de prêtre Jean, pas bien loin l'une de l'autre à terre (…) Sur une partie du roseau ils écrivirent le nom de Cinghis Can et sur l'autre le nom du prêtre Jean, et dirent à Cinghis Can : “(...) ces deux roseaux vont venir l'un sur l'autre ; et celui dont le roseau viendra sur l'autre assurément gagnera la bataille. Cinghis Can dit qu'il voudrait bien voir cela et dit aux astrologues chrétiens qu'ils le lui montrent aussitôt que pourront. Les astrologues chrétiens prirent leur psautier, lurent certains psaumes, puis firent leurs enchantements, et alors les parties du roseau s'agitèrent, il sembla que l'une se hissait sur l'autre, et enfin, sans que nul la touchât, celle où était le nom de Cinghis Can monta sur celle de prêtre Jean (…) Et quand Cinghis Can et ses gens virent cela, ils en eurent grande joie (…) puisque se voyaient sûrs de la future victoire. Et comme ils trouvent les chrétiens dans le vrai, toujours par la suite il leur fit grand honneur”. Les pronostics se révélèrent exacts et les deux hommes s'affrontèrent dans une grande bataille. Marco Polo raconte à ce sujet que “Cinghis Can gagna la bataille et Uncan, le prêtre Jean, fut occis en cette bataille et de ce jour en avant perdit sa terre”.
